Leûps (rue des)




     Avant de disparaître administrativement, Stembert eut à cœur de donner à certaines rues, des noms spécifiquement folkloriques de la localité (6 décembre 1976). 

   C’est ainsi que fut donné le nom de « rue des Leûps » à une nouvelle artère au Nord de la rue de Thiniheid, qui joint la rue sous la Hezée, dans le sens Est-Ouest. 

   



Ce terme de « Leûps », si répandu, nécessite des explications. Tout d’abord, qu’est-ce qu’un loup ? C’est un mammifère carnassier sauvage de la famille des canidés, très voisin du chien ; il est disparu de nos régions. 
D’un mètre soixante-cinq du museau au bout de la queue, il fréquente les lieux solitaires ; il se cache le jour et rôde la nuit. Surtout en cas de disette, il circule en bande et attaque les bœufs, les moutons, les chevaux et les hommes. 

    


   

    Passons maintenant au sobriquet des Stembertois. On sait que jadis ce fut l’habitude de donner des sobriquets aux habitants d’une localité par ceux des localités voisines ; ils procédaient plus de la plaisanterie que de la malignité ; en outre, à côté du nom officiel de la localité, il existait une appellation officieuse dite « gentilé ».

    Dans son ouvrage intitulé « Verviers, la bonne ville », Jos. Meunier en cite un grand nombre d’où nous extrayons :

 Solwaster : les « lopès », c’est-à-dire timides, peu dégourdis.

 Jalhay : les Lehous, signification inconnue. 

Polleur : les Laweus. 

Wegnez : les roubolès, origine inconnue, au lieu de Wegnolès. 

Verviers : les « magneus d’pèlottes » rappellent que durant la famine de 1794-95, nos concitoyens allaient manger des épluchures dans les villages voisins.

   Les Stembertois ne furent donc pas épargnés, et Jos. Meunier attribue le sobriquet des « Stemburkins » à leur attitude rustique. A tort ou à raison, on estimait que les Stembertois étaient peu liants et assez rébarbatifs, ce qui nous étonne, tant nous comptons d’excellents amis très affables à Stembert.

   Mais, on donne une seconde origine aux « Leups », à savoir cette anecdote : Au siècle dernier, bon nombre de Stembertois partaient du village pour aller travailler aux usines textiles sises aux Surdents ; ils descendaient, au petit jour, à travers la campagne de Bronde, assez déserte.

   Or, un jour, un gros chien s’échappa d’un ferme et rôda à Bronde, en quête de nourriture ; l’imagination en fit un loup, d’autant plus volontiers qu’il n’y avait guère de temps que l’on ne voyait plus de loup dans la région ;

   Nous empruntons la suite de l’histoire au numéro d’août 1974 de la revue « Lu Leûp » : 

« Il semblerait qu’un jour, un fermier aperçut dans le lointain des campagnes du Slar ou Bronde, un animal qui ressemblait fortement à un loup. Ce fermier apeuré, prévint le garde champêtre local qui donna pendant des jours la chasse à cette bête féroce.


   Au fur et à mesure que les jours passaient, la peur grandissait dans le village, à tel point que le soir, les habitants fermaient leurs portes à double tour, et que lorsque quelque chose d’anormal se passait dans la région, c’était la « bête » qui en était responsable. 

  Voyant les proportions que cela prenait, le bourgmestre, aidé de quelques courageux, décida d’organiser une battue. L’animal fût cerné, et l’honneur de la mise à mort revint au maire. La bête tuée ramenée fièrement au centre du village, un badaud ayant des doutes quant à l’origine du « loup » proposa qu’il serait intéressant de demander l’avis du « Maître » (Vétérinaire habitant à Verviers). Celui-ci arrivé sur les lieux regarda l’animal, puis s’adressa aux chasseurs en ces termes : « Et bien, Messieurs, je vous félicite, vous avez tué un beau chien ! ». En effet, ce n’était pas un loup, mais un pauvre chien égaré et affamé qui errait dans les campagnes. 

   



   


   Cette méprise fût très vite racontée dans les communes avoisinantes, et par moquerie, les habitants de celles-ci appelèrent les Stembertois « Les loups ». 

   Depuis lors, cette expression est restée et restera encore longtemps en usage chez nos voisins. Dans le fond, elle n’est pas bien méchante, et elle nous rappelle le temps où les gens prenaient encore le temps de rire et de s’amuser avec peu de chose, ce qui est rare de nos jours. 

  Cette épopée locale inspira le poète et un écrivain régional, Jean-Henri Courtois, consacra la 9e strophe de sa chanson Verviétoise sur les Stinburkins, à relater humoristiquement ces faits ; nous le citons :


«L’ancien mayeur du Stimbiet Su carabène tcherdjèye, su porminéve avau bwès, aveut st’one bone idèye, d’ô côp ètind dè bru, V’ià qui s’mette à l’affut, On bê tchin d’tchesse i veut, et y v’z-el towe p’on leû ». Mais, ce Jean Courtois (Courtwès) s’attira cette réponse du berger à la bergère, sous la plume d’Orphal Simon, membre du Vî Tchêne, qui écrivit sous le pseudonyme de « Fré Lambert » cette spirituelle strophe qui évoque le Tchès Volant des Verviétois. « Su n ’èst nin aviyèdje tôt seu, qu’on fèt dès bièstirèyes, On n ’fè dès bêles èssè, dj’creù duvins l’timp, è voss vèye Vos v’duvriz bè rapèler duvant d’voleur couyner, quu vos-autes, vervitwès, v’z-avez fêt voler l’tchèt ». 

    Nous venons de décrire combien le nom de leûp est populaire à Stembert : quoi de plus normal dès lors qu’il se soit créé en août 1974, une revue mensuelle sous le titre « Lu Leûp » ; neutre et apolitique, elle se consacre à faire revivre l’ancien Stembert, tout en donnant les nouvelles d’aujourd’hui. Son éditeur était M. J. Pirnay (26, Haut Tombeux).

   La sympathie des Stembertois pour le « Leûp » fit qu’indépendamment de l’asbl de ce nom, deux sociétés carnavalesques les « rouges et blancs » et les « Bleuzès cottes » fusionnèrent sous cette même appellation de « Leûps » (1975). 

LES LOUPS DANS NOTRE REGION. 

Cette histoire rocambolesque de loups, nous amène à évoquer la présence de ces carnassiers dans notre région, encore au 19e siècle ; nous y serons aidé par une étude de M. Emile Fairon (S.V.A.H., tome 33).














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